la guilde d’Altaride

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Les Montagnes hallucinées

Préparatifs new-yorkais

Campagne d’Asshâni

jeudi 10 février 2011, par Benoît

J’ai répondu à l’appel de ma bienfaitrice sans attendre. Le transatlantique Olympia était un navire luxueux, elle ne s’était pas moquée de moi. Tandis que nous voguions vers New-York, j’ai eu la joie de retrouver la petite Sarah Murray, qui venait de passer son doctorat en médecine. Une sacrée bosseuse cette jeune femme ! J’ai pu évoquer avec elle mes propres études. À mon âge, il est bien difficile de retourner sur les bancs de l’école ! Enfin, mes progrès en latin commencent à se faire sentir, cela peut toujours servir.

Comme Sarah était invitée tout comme moi à participer à la seconde expédition de l’université Miskatonic, nous avons fait le trajet ensemble en taxi. La petite était bien chargée, avec tout un tas de grandes malles. Ah, les femmes ! L’hôtel Hamearst, en plein Manhatan, était dans un quartier plutôt calme. C’était un bâtiment assez ancien, non sans un certain charme, pour peu qu’on apprécie l’architecture urbaine américaine... Tout ces grattes-ciels ! L’hôtel en lui-même était correct, sans plus. Nous avions rendez-vous avec le professeur William Moore, enfin, d’après le freluquet de l’accueil. Quand nous sommes arrivés, le professeur était déjà en pleine discussion avec l’aventurier en charge de l’expédition, le fameux Starkweather, discutant de préparatifs et de retards inacceptables.

Nous avons donc fait la rencontre des autres principaux participants à l’expédition, dont notre amie Miss Katherine Kenth et la surprise que nous réservait ce bon vieil Edward Pratchett : sa nièce, Elisabeth, se joignant à l’expédition en tant que professeur en géologue. C’était une jeune prodige universitaire Australienne qui cherchait à trouver du pétrole en Antarctique... drôle d’idée : du pétrole sous toute cette glace ?

William Moore nous exposa son objectif scientifique : retrouver les traces de la première expédition de l’université Miskatonic, menée par le défunt professeur Lake. Le professeur Moore était un proche du responsable de l’équipe de sauvetage, un certain professeur Dyer. On est sans nouvelles de ce professeur depuis son retour d’Antarctique,il ne donne même plus ses cours à l’université de Miskatonic. Voilà qui aurait suffit à me mettre la puce à l’oreille, vu les circonstances extraordinaires de leur rapatriement en Amérique.

D’après mes souvenirs, l’aventurier, Starkweather, était crédité dans un ouvrage de 1926, Survivre sur le toit du monde. Il y exagérait d’ailleurs fortement les découvertes et évènements de cette expédition... mais il connaissait visiblement les conditions difficiles qu’on peut vivre en haute montagne. Il n’y avait qu’à espérer ne pas tomber sur un os !

Après la réunion, nous avons fêté nos retrouvailles avec Sarah et Katherine. La jeune Miss Pratchett s’est jointe à notre petite fête, avec quelques nouvelles de son oncle, ce bon vieux Pratchett, décidément trop effrayé pour daigner remettre le pied à l’étrier !

Rendez-vous ayant été donné pour le lundi 4 septembre 1933,je me retrouve avec deux moisà attendre la suite des évènements. Deux moi, alors que j’en trépigne déjà ?

Je ne tenais évidemment pas en place. Après avoir relu tous les articles de journaux qui concernaient la première expédition, j’ai décidé de me rendre à Arkham pour essayer de retrouver la trace du professeur Dyer.

L’Amérique est une contrée bien étonnante. Nous sommes dans un pays désormais civilisé et raisonnable... et pourtant des gens aussi honorables qu’un digne professeur d’université disparaissent sans laisser aucune trace ! J’ai passé des semaines à interroger ses collègues de l’université de Miskatonic, à questionner le voisinage, revenir sur les lieux qu’ils fréquentait, son ancienne maison, désormais relouée à un illustre inconnu doublé d’un malappris...

J’ai retrouvé le professeur Pabodie, celui qui avait conçu la foreuse de la première expédition, qui permettait d’atteindre des strates très très profondes. Il raconte les corps mutilés par la tempête, même les chiens. Pressé de questions, son regard se perd dans le vide et dit « Ce n’est pas un endroit pour nous. Non ! »

Près d’Arkham, j’ai également retrouvé la trace de Mac Tighe, un des opérateurs radio de la même expédition, plutôt bonhomme, sain d’esprit, joyeux de vivre. Il était assez proche de Dyer. Il évoque les Montagnes hallucinées, près du camp de Lake. Énormes, c’était invraisemblable. Il ne se souvient pas des cadavres des Anciens. Blocage mental ? C’est très intrigant. Le professeur Dyer, lui, reste introuvable, en dépit de tous mes efforts.

Deux mois passèrent finalement.

De retour à l’hôtel, un message du professeur Moore nous invita à nous rendre sur les quais de l’Hudson, devant l’U.S.S. Gabrielle, caché derrière un gros transatlantique, l’Italian Royal Mail, mouillé au quai 74. À l’entrée du débarcadère, un gardien filtrait les membres de l’expédition arctique. Elisabeth Pratchett toisa le gardien de manière insolente... Quel manque d’éducation ! Je me suis bien entendu annoncé d’autorité avant de monter à bord, pendant que Miss Kenth sortait d’énormes malles de son taxi avec l’aide de sa nouvelle assistante, Mary Kenth, qui était également sa belle-sœur. Que de tracas, alors que nous ne venions que pour une première visite !

Un sous-officier de l’équipage nous accueillit finalement pour nous inviter à rejoindre le professeur dans le mess. Pensif derrière ses petites lunettes cerclées, barbu, cheveux en bataille en arrière, assez ridé, il nous salua de derrière une table couverte de notes. Il nous demanda de rencontrer le guide polaire, Mr Sykes, qui se ferait un plaisir de nous faire tailler des vêtements polaires sur mesure. Il nous expliqua également que toute l’équipe se retrouverait désormais chaque matin à l’hôtel pour une réunion de préparation de la journée, car les préparatifs de l’expédition étaient encore loin d’être achevés.

Mr Sykes, notre guide polaire, était un homme assez jeune, brun, le visage assez buriné, marqué par le soleil et la neige. Il prit nos mesures pour qu’une entreprise canadienne réalise les vêtements de l’équipe. C’était un homme rigoureux, assez plaisant, finalement. Histoire de briser la glace... héhé... je lui ai raconté quelques unes de mes aventures en Himalaya. Les équipements polaires arriveraient pour la fin de la semaine.

Nous sommes ensuite allés voir le docteur Green pour la visite médicale. Un gaillard à la moustache broussailleuse, avec un nez busqué et un grand front. Il effectua la visite médicale. S’ensuivit la visite chez un dentiste new-yorkais, pour éliminer tout risque avant le départ. Miss Kenth avait une carie... mais rien de grave ne nous retarderait sur le continent américain.

Après cette longue journée, nous avons passé la soirée ensemble, avec la nièce de Pratchett, Miss Kenth et Sarah.

Le lendemain, 5 septembre, c’était réunion à l’hôtel ! L’expédition se rassemblait de manière informelle pour prendre le petit déjeuné. On discuta en mangeant, notamment avecc Albert Marle (un météorologue), Louis Laroche (un opérateur radio français), Samuel Winslow (en 3e cycle de glaciologie), ainsi qu’un autre guide polaire : Niels Sorensen, un Norvégien. Arriva notre fameux aventurier Starkweather, avec son clinquant habituel. Il était tout fier de nous présenter, avec le professeur William Moore, la carte de l’Antarctique et du Sud de l’Australie, sur laquelle figurait notre itinéraire. L’expédition partirait le 14 septembre, passerait par le canal de Panama vers Melbourne en Australie (une escale d’une ou deux journées), et débarquerait dans la mer de Ross en novembre.

L’expédition bénéficierait de 3 Boeings 247 (de bons avions de transport) et d’un Fairchild qui avait déjà servi à d’autres expéditions arctiques.

L’expédition resterait sur place de novembre 1933 à février 1934. Ils comptaient ramener les dépouilles des disparus de l’expédition Miskatonic. Nous établirions 3 camps semi-permanents : près de la mer de Ross, un peu plus en avant à l’intérieur des terres et un dernier près du camp de Lake. Ces trois bases serviront, si tout va bien, de relais pour les trajets vers l’intérieur du continent. Starkweather était très confiant. Il enchaîna sur les projets de cartographie du continent, de faire des relevés scientifiques... Nous serions également sur le continent en même temps que 3 autres expéditions : Byrd, Ellsworth et Barsmeier- Falken.

Après la réunion, nous sommes réquisitionnés pour participer à l’inventaire de la cargaison. Les défaillances sont très nombreuses dans l’organisation ! Je relève les points suivants :

  • 23 kilos d’outils inutiles
  • 12 sacs de pitons d’escalade restent introuvables
  • 6 bocaux de crème aigre sont stockés en-dehors des frigos
    les radios portatives ne fonctionnent pas (il manque une lampe à l’intérieur, à commander)
  • des objets commandés sur les listes ne sont pas arrivés...
  • une grande boîte de matériel photographique était étiquetée « chocolat » et reste introuvable toute une journée
  • les cages pour les chiens de traîneaux sont trop grandes, elles ne casent pas entre les poutres du bateau

Miss Kenth inspecta les avions et constaae que le Fairchild n’arrivait pas à décoller. Il manquait des injecteurs, d’après elle, à commander en Angleterre... qui arriveraient trop tard pour le départ ! Heureusement Miss Kenth avait son propre avion, le Felicy, un Messerschmitt équipé pour les missions photographiques. Le professeur Moore accepta avec joie qu’elle prêtâ son appareil à l’expédition.

Je me renseignais donc un peu au sujet de Starkweather. J’étais devenu suspicieux, avec tout ces problèmes dans les préparatifs... Il avait organisé plusieurs safaris en Afrique et des expéditions en Himalaya, tous considérés comme de belles réussites. Seule ombre au tableau, il aurait failli faire tuer une femme en Afrique du Sud, une certaine Lady Lexington. Il l’aurait prévenue de ne pas traverser le fleuve mais l’imprudente s’y serait tout de même aventurée. Le fleuve a alors débordé et Starkweather a réussi à construire des radeaux avec l’aide d’autochtones pour franchir de justesse le passage. La dame lui en aurait toujours voulu.

Le soir ce de 5 septembre, bonne nouvelle ! Un article dans la presse clamait que le commandant Douglas, qui dirigeait le brick Arkham lors de la première expédition, reprendra du service pour notre voyage. Il avait une connaissance personnelle du pôle Sud du fait de sa participation à l’expédition Miskatonic passée. Ce serait également un bon témoin à entendre pour avoir des informations de première main sur ces fameux « Anciens »... Par ailleurs, dans le même journal, Lady Lexington annonça qu’elle montait sa propre expédition pour un départ également imminent en direction de l’Antarctique, le 10 septembre, juste avant notre propre départ, prévu le 11 ! Cela mit Starkweather dans une rage folle. Il exigea, ce fou, qu’on parte le 9 septembre. Il sortit en claquant la porte, furieux. Il pestait contre Lady Lexington, qu’il accusait de saboter notre expédition. Serait-ce elle qui superviserait toutes ces défaillances internes ? Je restais très dubitatif.

Le 6 septembre, nous nous sommes attablés avec le pilote, Halperrin, et Mr Sykes, assez placide (un bon gars avec un humour un peu noir). Nous prenions le petit-déjeuné quand Sarah, qui lisait le journal, poussa un cri ! Douglas, le commandant du brick Arkham, venait d’être retrouvé mort ! Sarah était décomposée, elle devait l’accueillir discrètement à la demande du professeur Moore... D’après le journal, il avait été repêché dans l’Hudson, près de Battery Park, dans le coma, avant de mourir pendant son transfert vers l’hôpital. Moore et Starkweather étaient déjà partis de l’hôtel... Sarah éprouva cependant l’envie de voir le corps à l’hôpital. Malheureusement une horde de journalistes nous attendait déjà dans le hall. Sarah donna rendez-vous à Miss Kenth à l’hôtel du malheureux Douglas. Kenth sortit par devant et se faufila habilement au milieu des journalistes. Avec Sarah, nous sommes montés sur le toit...